Je suis... quelqu'un de très spécial.
Résumons...

Son égocentrisme surdimensionné.
Petit, j'ai souvent été observé d'un mauvais oeil. C'est vrai, c'est quoi cette couleur de peau ? Mes parents m'ont souvent répétés la même chose, parce que ce n'était pas normal. Pourtant, j'ai fini par y prendre goût. Je me suis hissé à un rang qui me permette de ne plus être mal perçu. À présent, j'en suis presque à apprécier les lèches bottes. C'est tout de même plus sympathique de se voir dire qu'on possède de beaux yeux. Il y a plus original, certes, mais c'est un bon début.

Sa peur quasi phobique des femmes.
Qu'on se le dise, ces incarnations sont l'objet du mal. Je fais parti des extrémistes pour la simple et bonne raison que je déteste les femmes. Non, c'est même pire que ça, j'en ai carrément peur. Il faudrait certainement me tuer pour que je puisse un jour l'avouer - et pour le coup, ce sera trop tard - mais j'ai très vite tendance à perdre patience auprès de ces délicieuses créatures. Vade retro.

Son besoin continuel d'être entouré.
C'est tout de même mieux de parler avec des hommes non ? Ils me font bien la discussion, et même s'ils se taisent, je la fais à moi seul. Ça n'a pas l'air de les déranger plus que ça, puisqu'ils ont l'air de m'apprécier. Enfin, façon de parler, nous passons le temps, rien de plus. Des fois, chez moi, quand il n'y a personne à qui parler, je m'adresse alors à mes objets du quotidien. Ils ne sont pas bien bavards, mais justement ça m'entraîne à combler les trou dans une discussion. Bref, l'humain est tout de même préférable à la chaussette, qu'on se le dise.

Sa fâcheuse tendance à voir l'hérésie partout.
Il faut y faire attention, une faute est si vite arrivée. Les hérétiques sont partout, surtout chez les femmes. Certains petits gestes du quotidien peuvent être qualifiés d'hérétique, et je me méfie particulièrement des gens trop gentils avec moi. Oui, ceux-là ils cachent souvent quelque chose. Après tout, ne dit-on pas d'être proche de ses amis et encore plus proche de tes ennemis ? Si, bien sûr que si. C'est pourquoi j'ai tendance à me méfier de tout le monde. Sauf de moi, bien évidemment.

Sa présence joviale et collante.
Je ne suis pas collant, puisque personne ne m'en tient rigueur. Pourtant, les gens ne devraient pas se gêner, surtout mes supérieurs. Je souris tout le temps, ce n'est pas un mal non ? C'est une seconde nature pour moi, aussi naturelle que de respirer. Les gens m'apprécient un peu plus comme ça. Ou me trouvent bizarre, à voir. J'aime bien rire, parce que ça fait sourire ou ça énerve. Dans tous les cas, ça annonce une réaction. Et j'aime voir les gens réagir. Sinon, ça m'énerve.

Son chic d'être au centre des tensions.
C'est vrai, je parle, je parle beaucoup. Et comme j'ai souvent tendance à me mêler de ce qui ne me regarde pas, forcément, ça finit par avoir des retombées sur ma personne. C'est étrange mais c'est ainsi. La plupart des conflits finissent par en arriver aux mains, et c'est souvent moi qui finit par me prendre des coups. Je ne suis pas quelqu'un de violent, même si je me balade avec une épée. Elle est fine et coupe comme du beurre. De cette manière, il n'y a vraiment pas besoin de s'énerver ni de mettre de la force pour tuer quelqu'un.

Sa déplorable attitude masochiste.
C'est vraiment l'image que je donne ?... C'est vrai que me prendre des coups ne me fait ni chaud ni froid. En fait... J'ai dû y prendre goût, très probablement. Les chaines autour de mon cou en sont la preuve intangible. Il m'est aussi arrivé plusieurs fois de me couper. Juste comme ça, pour le plaisir. C'est ça, être masochiste ?

Sa peau métissée.
Elle en étonne toujours plus d'un. À croire que je suis l'unique personnage un peu "coloré" de ce monde gris. Ça me déprime toujours de voir ces gens venir vers moi et me demander si j'ai fait, ou d'ailleurs subit quelque chose pour en arriver à un pareil résultat. Ah, vous croyez que les gens apprécient ? Trouvent ça beau ? Non mais quelle blague, où vous croyez-vous donc ?! En tout cas, je ne renierai cette couleur pour rien au monde, car c'est elle qui après tout m'a conduit à ce que je suis aujourd'hui.

Ses yeux verts.
Ceux-là, il faut dire qu'en revanche, ils pallient beaucoup à ma couleur de peau. En général, c'est ce que les gens remarquent le plus. Avec ma couleur de cheveux, bien évidemment. Je suis une personne à part, que voulez-vous. Avec une peau aussi foncée, même mes yeux paraissent étinceler.

Ses cheveux blancs.
En bataille. Souvent en bataille. Je ne cherche pas trop à les coiffer à vrai dire, même s'ils me tiennent vraiment à coeur. Vous ne les trouvez franchement pas beau ? Magnifique, pour ainsi dire ? Ma raie est du côté droite, et si mes cheveux paraissent ô combien nombreux sur mon crâne, en revanche, je n'apprécie pas franchement les voir trop longs. Ils descendent en général aux épaules et...

Son accoutrement étrange.
... J'avais pas terminé. Et je porte absolument bien mes habits. Ils sont toujours blancs, enfin la plupart du temps, car voyez-vous, j'aime le blanc. Il est symbole à la foi de...

Ses piercings non réglementaires.
Oui, c'est vrai qu'on me reproche souvent d'avoir les oreilles percées alors que ce n'est pas vraiment autorisé. Mais je refuse de voir se refermer ces trous sur mes joli petits lobes alors voyez-vous, je les entretiens.

Ses chaines masochistes.
Mes supérieurs aiment bien me les tirer quand ça leur chante. Résultat ça m'étrangle. Mais je sais pas, je trouve que c'est classe les chaines. Pas vous ?

Je suis l'enfant illégitime d'une reine et d'un étranger,
l'enfant de deux monstres,
l'enfant d'un pays hostile,
l'enfant aux mille identités,
l'enfant sans origine.

Moi, je ne suis que Jhalis.
Né dans les bas quartiers de Whalis, j'étais l'enfant qui ne devait pas naître. Ma mère, appelons-là en tant que tel, était déjà surmenée avec trois autres gosses à sa charge. Le père ? Il était là, lui aussi. Ah, ma famille était pauvre. Et mon apparition n'était pas tant bien accueillie. L'avortement ? Ils y avaient longuement songé. Mais ma mère m'en a sauvé.

En cette basse saison, sous cette faible lumière, plongé sous plusieurs mètres cubes d'eau, j'ai respiré mes premières bouffées d'oxygène. Ce fut la première erreur. Peut-être aurais-je dû mourir, ce jour-là. Après tout, je n'étais encore rien à cette époque. Mes parents auraient tout aussi bien pu me noyer. Ce n'était pas l'eau qui manquait. Nous étions des êtres tellement faibles.
Et pourtant...

La seule chose qui me sauva ce jour-là fut la curiosité de mes parents. Un enfant métisse aux cheveux blancs. Alors même que rien ne me rapprochait des gênes parentaux, ces derniers ont décidés de m'élever. Et dès lors, mon existence est devenu un enfer...

Ah, vous y avez cru ? *secoue la main* Voyons, voyons, d'où venez-vous pour me prendre en pitié ? Non, ma vie s'est déroulée comme une personne normale. J'ai découvert mon totem vers l'âge de 5 ans. Je revois bien la frayeur de mes parents ce jour-là. Haha, si vous aviez vu leurs têtes lorsque j'ai touché ce gros serpent qui faisait trois ou quatre fois ma taille en longueur. Mais bon, ne nous éternisons pas sur ce passage insignifiant.

Vers mes six ans, les gens ont subitement commencés à s'intéresser à moi. Moi qui avait souvent l'habitude de vivre caché, je dois bien avouer que cela m'a fait tout drôle. Ce n'est que quelques années plus tard que l'on m'appris que j'étais enfant illégitime d'un lointain roi sous la domination du grand roi bien évidemment, ce qui expliquait ma couleur de peau. J'ai commencé, à partir de ce jour, mon plus long périple à travers Heka. On m'amena jusqu'à ce fameux roi où ma soi disant éducation commença. J'avoue ne pas trop me souvenir de cette époque. Il faut dire que c'était ennuyeux à mourir. J'ai eu quelques précepteurs qui n'ont pas duré. J'étais un enfant qui se fichait de tout. J'ai appris le maniement de l'épée, et c'est somme toute ce que j'ai le mieux retenu. J'ai commencé à sourire, et ce sourire ne m'a depuis jamais quitté, alors même qu'il aurait dû disparaître pour toujours.

En effet, cette belle époque n'a pas duré. Les chuchotements dans mon dos se firent plus intenses et bientôt les rumeurs effleurèrent les oreilles de ce petit roi alias mon père. Après analyses de parenté, je ne me trouvais pas de lignée royale. En l'espace d'une journée, ma vie bascula et je fus jeté en prison pour simple usurpation d'identité. Victime de ma propre couleur de peau à l'âge de 7 ans à peine, les domestiques commencèrent à me battre et on m'enchaîna. Je continuais à sourire, sans aucune rage. Sans aucune haine. Je trouvais ça normal. C'était de ma faute.

*On ne me punit pas pour ce que je fais, mais pour ce que je suis.*
C'était tellement logique. Je subissais tout sans broncher, mais ça allait s'arrêter. J'ai commencé à agir avec un peu plus de vitalité. Je répondais à mes agresseurs, les taquinais alors qu'ils me lacéraient le dos. La douleur, j'ai fini par ne plus la ressentir, ou plutôt par l'accepter. Mais mon sourire n'a jamais changé, lui. Toujours aussi honnête et profond, sans tristesse ni énervement.

Les années passèrent rapidement. Trois ans à vivre au cachot et je fus envoyé autre part. On me fit bien manger, mais tout était blanc. Un hôpital... particulier. Il y avait des gens étranges, à l'intérieur, mais ils parlaient souvent avec moi alors ça me changeait. Et puis, un jour, l'un d'entre eux disparaissait et on ne le revoyait plus. Je m'étais attaché à une fille de mon âge, dedans. Elle était moche, aveugle et elle pleurait presque tout le temps, mais lorsqu'elle riait, on aurait dit un soleil. Je lui avais promis qu'on resterait ensemble. C'était une grande dame, avec un tablier noir, qui était venu la chercher deux jours avant ma sortie. J'ai pleuré pour la première fois, mais je n'ai rien fait pour la retenir. J'ai détesté les femmes du plus profond de mon être, et ce sentiment de rage fut le premier d'une longue série. Cette haine s'est progressivement muée en phobie.

Vint le jour de ma sortie. Une personne est venue me voir. Elle m'a montré plusieurs photos de monstres. D'autres personnes sont arrivées. J'ai compris qu'ils cherchaient à voir si je n'avais pas un quelconque lien de parenté avec ces créatures. Alors j'ai ris d'un rire cristallin. Ils me pensaient fou, mais je pensais la même chose d'eux. On m'a frappé mais je n'arrivais pas à m'arrêter de rire. Une vulgaire couleur de peau prenait des tournures étonnantes. Et ce ne fut que le prologue d'une longue série. On cherchait à justifier mon existence. Je passais de main en main, obéissant mais à la grande gueule. La mort me passa devant à chaque fois, mais on ne fit rien. J'étais devenu un rat de laboratoire. Il y avait bien d'autre métisse en ville. Mais moi j'étais différent, parce que mes parents étaient blancs. Parce que mes gênes ne correspondaient pas à ceux de mes parents.

Cette affaire monta bientôt dans les hautes sphères de la société, et j'eus l'ultime chance de rencontrer le roi et d'en ressortir vivant. L'entrevue ne dura en elle-même qu'une vingtaine de minutes. On discuta de moi, et encore de moi. J'étais devenu important, et ça m'était monté à la tête. J'étais devenu quelqu'un moi qui était insignifiant et qui méritait la mort à la naissance. J'étais un homme endurci du haut de mes 23 faibles années. Un garçon sauvage qui n'avait pas même peur de la mort et qui la côtoyait au quotidien. J'étais dangereux. Quelqu'un à éliminer. Et pourtant, j'ai fait ce choix. Non pas par obligation, mais juste par envie. J'ai imposé ma place chez les religieux. Et le roi m'a lancé ce sourire amusé que je n'oublierai jamais. Il a accepté sans plus de cérémonie.

C'est ainsi que je suis devenu un homme d'église, chez les extrémistes. On m'interdit le port des piercings, mais je ne l'entendais pas de cette oreille. Comme ultime rébellion, j'ai fini par remettre des chaînes autour de mon cou, si bien qu'en marchant je fais bien souvent un boucan du diable. Mes supérieurs me repèrent souvent à des kilomètres, avec mon épée à la ceinture, mais ils ont l'air de s'y être habitués, à la condition que je masque tous ces signes pendant les messes. Ce que je fais, bien entendu.