Orgueilleuse ? Envieuse ? Avare ? Hautaine ? Arrogante ? Allons allons, il est temps de rétablir la vérité.

On accuse injustement la pauvre, pauvre Celeste d'être orgueilleuse. Pourtant, ce n'est pas vraiment ça. Elle est juste très coquette et elle aime les belles choses. Robes, chaussures, maquillages, bijoux, elle adore ça. Parader en robe de soirée la journée après quelques offices, une ombrelle sur l'épaule. Elle passe sont temps à entretenir sa peau et accorde une attention toute particulière à son physique en général. Superficielle, ou pas, cela dépend des points de vue. Celeste aime les belles choses, qui l'en blâmerait ? Pour autant elle n'hésite pas accorder son attention à tous ses paroissiens, quels qu'ils soient et peu importe leur physique !  Vouloir posséder un objet convoité où même une personne, simplement parce que le désir de le capturer est trop fort ce n'est pas vraiment de l'envie. Après-tout elle ne conserve jamais longtemps à ses côtés ces objets où ces personnes. Cœur d’artichaut ? Mais non ! Ce serait égoïste de ne pas s'en défaire ! Élever un harem ? Ça coûte tout simplement trop cher en nourriture et en attention. Il lui faut bien de l'argent pour payer ses domestiques, comment feraient-ils pour subsister sans elle ? Amasser des tas et des tas d'objets plus incongrus que les autres ? Absolument pas, sinon les domestiques de son domaine se serait déjà mis en grève. Vous imaginez le nombre de coup de plumeau pour les dépoussiérer tous, uns par uns ? De ce fait Celeste revend ses possessions, « abandonne » ses amants. Elle se sacrifie pour le bien des autres ! Mais ça personne ne le comprend, non.  

On dit parfois que Celeste n'aime pas... Le bas peuple. Des commérages ! Bon, c'est vrai qu'elle ne se porte pas volontiers volontaire pour aller rendre visite aux miséreux dans le bas quartier, où dans les orphelinats. Mais c'est que, vous comprenez il ne faudrait pas qu'elle attrape un coup de soleil ? Est-ce que vous imaginez un peu les dégâts de l'astre lumineux sur une peau aussi laiteuse que la sienne ? Et puis tout le monde sait que le bas peuple n'est évidemment composé en général de croyants fous qui font semblant de n'avoir besoin de rien, alors que, finalement l'aumône récolté chaque dimanche vient remplir leur bourses bien rebondies! N'est-ce pas scandaleux ? Et le piiire, c'est qu'ils sont de plus en plus nombreux ces faux riches ! Après-tout, la pauvreté, c'est un peu avoir la belle vie. Passer son temps à faire semblant de ne rien savoir faire pour ne pas travailler durement, vivre au jour le jour avec sa petite femme, ou son petit mari,  choisissant de jeûner intentionnellement  puis après que leur corps soient devenus fins ils s'exposent dans la rue, les joues creusées pour mendier avec les VRAIS pauvres. Esquivant leur impôt sur la fortune simplement parce que maintenant ils ont soi-disant choisi de vivre selon les préceptes de Kel'Chin, alors que bon, Kel'Chin il n'a jamais dit aux hommes de faire semble d'être pauvre... La plèbe ne se révolte pas, pourtant. Si Celeste avait été elle-même pauvre elle aurait déjà incendié les maisons de ces vrais hérétiques !

En ce qui concerne les orphelinats... C'est un peu plus complexe que cela. Si elle refuse d'y mettre les pieds c'est tout simplement parce qu'elle sait quel piège l'attend ! Ces endroits c'est comme les animaleries. Non, pas celles de la capitales qui proposent maintenant des minis monstres en animaux de compagnies, les riches ont parfois des hobbys plutôt bizarres. Celles où ils ne vendent que des petites choses mignonnes, que la plupart achètent pour les sacrifier sur l'autel, qui vous regardent comme si vous étiez leur seuls espoirs. Si vous en achetez un vous vous sentez obligez d'acheter les autres... Et puis une fois à la maison vous vous rendez compte que vous ne pouvez pas vous en occuper. Qu'il y en a trop. Et finalement ils finissent tous par mourir de faim. Les orphelinats c'est un peu pareil ! Si elle voyait la tête malheureuse de ces petites têtes blondes elle serait capable de les ramener tous à la maison. Et puis, comme les animaux ils finiraient par dépérir.  Elle sacrifie totalement son instinct maternelle et son horloge biologique pour ces petits êtres sans défenses ! N'est-ce pas beau ? N'est-ce pas noble de sa part ? Sainte Celeste veille sur nous !

Si certaines personnes pensent que la Grande Prêtresse est arrogante c'est aussi à cause de son attitude. Sûre d'elle, elle marche lentement, la démarche assurée, certaines mauvaises langues diraient qu'elle ne fait que parader, comme une Reine de Sabbat au milieu de la plèbe. Elle adresse volontiers des sourires à ses pires détracteurs, on la pense suffisante, alors qu'en fait c'est simplement de la sympathie ! Ils ont peut-être envie de la détester, mais Celeste ne les détestes pas vraiment en retour, elle se pense intouchable et puis de toute façon, pourquoi passer son temps à les haïr à son tour ? Ce serait cruel, si elle commençait vraiment à leur pourrir la vie il y aurait longtemps qu'ils seraient brisés aussi bien physiquement que mentalement. Demandez donc aux quelques malheureux qui ont provoqué sa colère ! Ah. Non. Vous ne pouvez pas. Les personnes atteintes de démence ne peuvent recevoir de la visite. On dit qu'elle n'hésite pas à montrer aux autres qu'ils sont inférieurs, qu'elle prend même un certain plaisir à les rabaisser. Que nenni ! La jeune femme ne fait qu'être franche et   puis, certains semblent mal à l'aise et se sentent naturellement inférieurs ! Elle est belle, charismatique, elle a bien réussi professionnellement parlant. C'est normal que les autres se sentent inférieurs, il faut dire ! En plus, elle n'hésite pas à le dire. Il n'y a aucune honte à se sentir inférieur et faible en face d'une personne telle que Celeste. D'ailleurs elle ne les en blâme aucunement, il lui arrive même de ressentir de la pitié lorsqu'elle les regarde. De simple malentendus vous voyez ?

Colérique ? Hystérique ? Sournoise ? Instable ? Paresseuse ? Esclavagiste ? Gourmande ? Des exagérations, rien de plus !

D'autres défauts injustement imputés à sa personne! Ses détracteurs disent qu'elle est colérique ! Ce qui est vraiment infondés. Ceux qui sont vraiment remplis de colère ce sont ceux qui répandent de telles vilenies !  Celeste sourit, tout le temps, vraiment tout le temps. Même lorsqu'il lui arrive d'être désagréables avec les autres. Mais attention c'est qu'ils l'ont vraiment mérité. Elle n'est pas du genre à fracasser les objets contre les murs ! Encore une fois, son truc à elle c'est de les briser complètement, les gens. Jamais de coup d'éclats, jamais de cris, jamais de drame, jamais de bruit de verre cassé. Si Celeste était vraiment colérique, ce qu'elle n'est absooolument pas, sa colère serait plutôt froide. Elle n'attaque jamais directement la personne. Voler un amant ou une amante, s'incruster dans ses petites soirées pour voler la vedette à la personne ciblée, obtenir des choses auxquelles elle tient véritablement, les faire disparaître mystérieusement... Envoyer des lettres anonymes particulièrement agaçantes mais jamais vraiment menaçantes. La faire suivre jusqu'à faire naître en elle une paranoïa plus ou moins envahissante, ne jamais lui laisser véritablement de répits. Jusqu'à ce que la folie s'empare de son esprit. C'est pour ça qu'on la pense sournoise ! Mais après-tout, rien ne prouve que se soit elle à l'origine de tout cela ! La seule chose qui la lit à ses soi-disant victime c'est simplement le fait qu'elles fassent partis des gens qui ne l'aiment pas ! Des détracteurs elle en a à la pelle ! Et pourtant, ils ne sont pas tous devenus fous ! Pas encore. Enfin. La méchanceté gratuite et la haine est toujours punis par Kel'Chin ! Peut-être que c'est lui qui provoque toutes ces démences ! Ça ne fait pas de la blonde une folle complètement instable ! Celeste, toujours la cible des pires quolibets.

La pire rumeur qui circule sur elle, actuellement, c'est son manque de foi, ou sa paresse spirituelle. Ce qui est complètement ridicule. Une Grande Prêtresse qui, plusieurs matins par semaine s'évertue à guider les croyants en officiant à l'église, n'est pas capable de paresse spirituelle. Si ces rumeurs viennent entacher sa réputation c'est simplement parce qu'elle s'écarte quelque peu des sermons habituellement entendus dans d'autres églises. Elle encourage même ses fidèles à ne pas changer leur mode de vie, que l'austérité n'est pas une chose voulu par le Grand Kel'Chin ! La blonde ne fait que rétablir la véritable bonne parole de leur Dieu ! Seulement, ça ne plaît pas à tout le monde. Surtout lorsqu'on sait qu'elle refuse de sacrifier qui ou quoi que ce soit sur l'autel. Oh, bien sûr elle n'interdit pas les sacrifices, ses collègues peuvent bien faire ce qu'ils veulent et finalement ses paroissiens aussi! Elle refuse seulement d'assister à ces rites. La vue du sang la dégoûte profondément. L'idée même de sacrifier des créatures innocentes lui provoque des haut-le-cœur ! Ce n'est pas sa faute, à la pauvre Celeste ! C'est tout simplement une jeune femme délicate. Personne ne devrait lui en vouloir. On prétend aussi qu'elle aime souvent passer par des intermédiaires pour effectuer certaines tâches. Cela ferait d'elle une fainéante. C'est totalement faux ! Elle préfère laisser faire les autres lorsqu'elle sait qu'elle n’excelle pas quelque part. Elle paie grassement, en plus, de sa poche et de sa personne, lorsqu'il le faut véritablement ! Ce sont ses domestiques qui peuvent le dire. La Grande Prêtresse aime avoir des gens autour d'elle, à son service, surtout, les contrôler... Mais simplement pour ne pas se sentir trop seule, c'est une enfant unique, elle aime juste avoir du monde autour d'elle. C'est quand même mignon ? Non ?

On dit que Mademoiselle Celeste aime manger énormément, avec excès. Mais, enfin, pas du tout ! Regardez ces hanches saillantes ! Ce ventre plat ! Ces fesses fermes ! Elle ressemblerait déjà a un cochon blond depuis belle lurette si elle avait véritablement mangé tout ce qu'on lui attribue !  En plus, elle choisit sa nourriture avec beaucoup d'attention, pas question de manger des plats ordinaires ! Après si on parle de ses conquêtes on s'écarte véritablement de la gourmandise pour parler d'une autre de ses soi-disant tare.

On l'accuse d'avoir une attitude un peu trop... Sulfureuse. Ce n'est tout de même pas sa faute si elle possède beaucoup de sex-appeal, la pauvrette. Au contraire, c'est plutôt éreintant ! On crie, on montre du doigt ses excès, surtout lorsque ses amants sont mariés. Elle aime les hommes, les femmes, sans exclure les pauvres êtres mariés et malheureux ! Elle ne fait que leur apporter un peu de bonheur ! Et puis, attention, Mademoiselle ne couche aussi facilement ! Elle donne de sa personne lorsqu'il le faut. On pourrait lui reprocher de ne s'intéresser qu'aux personnes qui peuvent lui apporter quelque chose, mais ce ne sont là que jeu d'alliance, tout ne se monnaie pas exclusivement avec l'argent. Le flirt est un outil diplomatique, il faut savoir utiliser tous les atouts mis à sa disposition. Et puis ce ne sont pas ses amants qui vont s'en plaindre ! Oh, après on peut lui reprocher d'être une brise cœur, une brise ménage. Ce n'est pas sa faute. Elle ne peut pas forcer les gens à l'aimer, après-tout ! Bien sur que non. Ils sont libres de refuser ses avances comme elle est libre de refuser les autres. Elle prévient toujours que même s'il y a un peu de flirt jamais il n'y aura de romance. Celeste est une personne honnête, voyons ! Elle ne se pense pas équipée pour ressentir de la passion. Oh, de l'amitié, pourquoi pas, mais de l'amour ! Non, Grand Dieu, il n'y a rien de pire que d'être esclave de ses propres désirs et de ses sentiments. C'est d'ailleurs la pire crainte de la Grande Prêtresse, contrôler les autres oui, mais se faire contrôler, manipuler ? Non merci ! Elle tient beaucoup trop à sa liberté. Celeste est en fait une personne sympathique qui œuvre pour le être des autres, franchement, toutes ses rumeurs sont injustifiés, vous ne pensez pas ?

La jeune femme s'éveille, lentement, elle se redresse simplement et s'étire, contemplant le paysage de la magnifique capitale. Aujourd'hui le temps ne semblait pas trop ensoleillé, elle s'en réjouissait d'avance. Les rayons avaient beau éclairer les sombres recoin de l'église de la capitale et la journée des pauvres manants qui survivaient dans les bas quartiers, ils n'en restaient pas moins dangereux pour sa pauvre petite peau d’ivoire. Elle soupire mignardement, tapotant de l'index sa petite joue palote. Celeste. Une peau si blanche qu'on pourrait penser qu'elle est faite de lumière. Lorsqu'elle entrait quelque part tout le monde se retournait. On enviait sa peau délicate presque diaphane. Les mauvaises langues n'hésitent pas à modérer son éclat, prétendant qu'elle n'aurait pas ce teint laiteux si la jeune femme avait passé beaucoup plus de temps ailleurs que dans son église et dans les soirées organisés par tout le gratin de Kahl.

La jeune prêtresse s'extirpe de ses draps, admirant le faste et les couleurs chatoyantes de sa chambre. Et dire que certains fanatiques allaient jusqu'à pointer du doigt son opulence et sa richesse... Pire, qu'ils se contraignaient à vivre dans la pauvreté, se privant de  confort, de sexe, d'alcool et d'autres petits plaisirs de la vie, tout en clamant haut et fort que leur âme valaient plus que n'importe laquelle de ces «Grands Prêtres cachés dans de jolies maisons et se livrant aux pires pêchés ». En attendant ce n'étaient pas ces fameux prêtres qui prétendent à tue-tête que leur âme valent mieux que d'autres.

Celeste s'avance, une nuisette de soie sur la peau, lentement, appelant quelques domestiques qui lui annonce que son bain parfumé l'attend, comme chaque matin. Elle les suit de sa démarche assurée, saluant d'un sourire les rares domestiques debout à cette heure. La prêtresse se dénude, au milieu de ses suivantes, pas pudique pour un sous, s'observant quelques instants dans le miroir, les mains sur les hanches.

«Mh... Aurais-je perdue de la poitrine... Diantre... »

La jeune femme se tâte le sommet de ses seins, se cambrant légèrement, ils n'avaient pas encore pris la forme de deux poires, au moins. Lentement elle glisse sa main contre son ventre, le tapotant légèrement. Pas un seul petit amas de graisse, ni même de peau d'orange cependant ses hanches étaient un peu trop saillantes, on pouvait même entrapercevoir les os de son bassin. Une petite cure de petits gâteaux, et le tour serait joué. Après s'être observé sous toutes les coutures à grand renfort de petits soupirs délicats elle finit par s'installer dans la baignoire de porcelaine, laissant ses domestiques l'aider à faire ses ablutions quotidiennes.


Après son bain elle regagne sa chambre, le corps simplement couvert par une serviette puis s'installer sur sa coiffeuse. La jeune femme saisit sa brosse pour dompter ses boucles blondes. Il lui fallait bien une centaine de coup de brosse par mèche pour les rendre soyeux, ne serait-ce déjà que pour éviter qu'elles ne s’emmêlent un peu trop. Avoir des long cheveux nécessitait un entretient régulier surtout lorsqu'ils vous arrivaient au bas des fesses. Après les avoir brossés, la jeune femme les ramenas en deux chignons sur sa tête, ainsi ils ne risquaient plus de s’emmêler. Elle se poudra le nez et se mit du blush sur les joues avant d'aller souligner le bleu de ses yeux. De la main elle taquinait son totem du doigt, elle le savait qu'elle le glisserait plus tard dans sa poche, histoire de repasser le stick sur ses lèvres, son pouvoir en était renforcé ce qui est plutôt pas mal, surtout lorsque comme elle, vous avez un tas de détracteurs à vos trousses. Rien de tel pour leur faire fermer la bouche à ceux-là.

Celeste se dirige vers sa penderie à présent, remplie de robes plus somptueuses les unes que les autres, certaines plus simples mais toujours créé à partir de tissus fins et de matières précieuses. La jeune fille attrapa une robe blanche un peu simple, brodée de fils d'or, la tenue qu'elle enfilait pour ses offices. Une fois apprêtée, elle sortit de sa chambre, pour aller déjeuner promptement. Elle devait rejoindre au plus vite l'église de la sainte capitale, Kahl.

Elle avançait, rapidement envoyant des sourires bienveillants aux quelques fidèles qu'elle reconnaissait, essuyant des regards mauvais de la part de certaine femmes qu'elle connaissait. Ses détractrices les plus acharnées. Elle se contentait d'un regard qui se voulait suffisant, bien qu'elle ne pouvait pas compter sur une taille ou une carrure impressionnante elle savait que le meilleur moyen d'impressionner ces femmes était de soutenir leur regard. Bientôt Celeste arriva sur le parvis de l'église. Elle embrassa de son regard le bâtiment religieux, avant d'y rentrer, un sourire sur les lèvres. Elle avait un troupeau d'âme en peine à guider.

La jeune femme se pose sur un banc trônant dans le déambulatoire. L'office venait de se terminer, le prêtre de son église faisait le tour des fidèles, écoutait leur confession. Celeste aurait dû se retrouver  dans la nef à accorder une oreille soucieuse aux croyants, répondre aux questions sur son sermon du jour. Cependant, elle avait ressentie le besoin impérieux de s'éloigner quelques instant, prétextant un malaise aussi soudain qu'incongru. Le dos bien droit elle contemplait la nef, perdue dans le fil de ses pensées. Elle venait aujourd'hui d'entrer dans sa quarante-et-unième année, elle n'aimait pas les anniversaires, surtout le sien, cela la plongeait dans un état mélancolique... Où était donc passée son enfance ? Les années défilent et même si son visage n'est pas marqué par le temps, son cœur lui semble vieillir un peu plus chaque année.

Celeste, fille d'Agnès Levesque-Cooper et de Aaron Cooper, deuxième du nom. Madame Cooper était au premier abord juste une fille sans histoire, élevée à Salinca elle s'était mariée à un garçon de la capitale, un petit marchand au grand cœur. La jeune femme, tout droit sorti de sa campagne était venue saluer son aïeule s'était retrouvée perdue dans les bas-fond de la capitale. Des hommes, un peu ivres en cette belle matinée d'automne l'avait encerclé. N'écoutant que son courage le petit marchand qui passait par là, était venue secourir l'ingénue. Le jeune homme n'était guère bien musclé, cependant il parcourait les routes de tout Heka depuis sa plus tendre enfance, il avait affronté bien des monstres à l'aide de son totem, un poignard finement ouvragé. En deux temps trois mouvement les hommes aux nez rouges s'enfuirent en titubant, retenant leur pantalon avec leur main. Sa mère avait eu le coup de foudre pour cet homme simple mais infiniment courageux. Le coup de foudre fut réciproque. Après que l'homme lui ai fait une cour acharnée et après quelques rendez-vous, Agnès et Aaron s'unirent pour le meilleur et pour le pire. Un vrai conte de fée.

Celeste croisa les jambes, s'appuyant contre l'édifice, toujours droite. Elle rit de sa voix cristalline, un petit rire de colibri à peine aussi bruyant. Les contes de fées s'arrêtaient généralement ici, éludant le reste par « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants.» La suite de l'histoire n'était pas forcément jolie à entendre. Certes ils eurent des enfants. Seulement un, en vérité. Un ravissant petit poupin à la chevelure dorée et aux yeux bleus rieurs. Ils vivaient dans une petite maison, dans la capitale, qu'ils n'occupaient que rarement puisqu'ils partaient souvent avec la caravane d'Aaron. Ils parcouraient les dangereuses routes entre les différentes villes, affrontant souvent de terribles monstres. Il n'était pas rare que quelques bétails soient sacrifiés pour assurer la sérénité de leur périple. Celeste avait commencé à accompagner ses parents dès son plus jeune âge. Bien entendu jusqu'à l'âge de cinq ans elle était restée bien à l'abri à Salinca, chez sa grand mère maternelle, retournant à la capitale lorsque ses parents revenaient d'excursions.

C'est durant ces expéditions qu'Agnès et sa fille rencontrèrent Kel'Chin, et la foi. Un monstre avait renversé la caravane où niché la maman et sa chère tête blonde ainsi que les femmes des autres marchands. Une chimère, résultat complexe d'un mélange entre plusieurs animaux, s'avançait vers le chariot. Le cri perçant de l'animal avait fini   de terrifier l'ensemble des femmes qui se débattaient pour sortir de la caravane renversée. Beaucoup d'entre elles fuyaient, mais Agnès elle se débattait pour sortir sa fille des décombres. Le monstre s'approchait dangereusement alors que la pluie commençait à s'abattre sur les pauvres marchands. Il avançait puis se penchait vers les deux petits êtres qui se débattaient inutilement la gueule ouverte, tous crocs sortis. Était-ce la fin ?

La jeune mère de famille se releva, brandissant le livre sacré de Kel'Chin, elle n'avait jamais cru avec autant de ferveur qu'à cet instant. Alors que le femme affrontait le monstre Celeste finissait de sortir de la caravane. Elle s'accrocha à l'une des jambes de sa mère, un instant effrayé, puis elle se détachait, alors que sa mère flanchait de plus en plus. La jeune enfant s'approchait inconsciemment de la bête, allant flatter sans crainte le menton de la créature. Agnès regardait impuissante et terrifiée la scène, suppliant son enfant de revenir ici. Pourtant celle-ci refusait, continuant de flatter la bête, détachant même un petit bout d'épine coincé dans son flanc. Au bout d'un moment la petite demanda à la créature de partir, celle-ci obtempéra, bon grès, mal gré, la démarche un peu pataude.

Tous se réunirent autour des deux rescapées, semblant ne pas comprendre ce qu'il venait de se passer. Le ciel s'éclaircissait, emportant avec eux l'averse et les ténèbres. La mère pleurait, serrant son enfant dans ses bras. Elle ne savait pas ce qui venait de se passer, comme la plupart des marchands et de leur famille. L'enfant tapotait maladroitement le dos de sa tendre maman, ne comprenant pas l'émoi qui secouait l'assemblée. Son père, penaud s'agenouilla et demanda, la voix tremblante.

« Dis-moi mon poussin... Comment as-tu fait pour faire partir la créature ? »

« Mh... bah je lui ai dit de partir et il l'a fait ! »

« Je veux dire... Comment … Pourquoi... Il t'a écouté... ? »

« Bah... C'est Kel'Chin qui m'a dit que je pouvais avoir confiance et que tout ce que le monstre voulait c'est qu'on lui enlève l'épine coincée dans son menton... Et qu'il s'en irait quand je le lui demanderais. »

L'assemblée frémit, toute d'un seul mouvement.

« Kel'Chin ? Tu veux dire...Tu veux dire... »

« Je sais pas... Il m'a dit que nous on l'appelait comme ça, dans ma tête. Et c'est tout. »

L'enfant esquissa un sourire, sans comprendre comment ni pourquoi les adultes étaient si agités après ses paroles, quelque peu ingénue. Les autres commencèrent à prier, remerciant leur unique Dieu, adressant également des remerciements au couple et à leur enfant. Le reste du voyage se passa relativement bien, mieux encore sur la route et sur les indications de l'enfant indiqua un gisement de pierre précieuse. Une fois rentrée en capitale la rumeur se répandit comme une traînée de poudre. Nombreux étaient ceux qui chantaient les louanges du Dieu et de l'enfant miraculée. Certains croyaient qu'elle était la messagère du Seigneur, d'autres encore pensaient qu'elle était la forme terrestre du Tout puissant.

La folie gagna rapidement la capitale, plongeant Celeste dans une profonde perplexité. On venait lui demander de bénir des enfants malades, d'accomplir quelques miracles. Elle s'exécutait sous la direction de sa mère, rapportait les paroles que lui avait transmise Kel'Chin, avant qu'une délégation du Kel'chinisme vienne officiellement rendre visite à la soi-disant prophète en culotte courte. Kel'Chin s'était incarné dans une fillette ? Ridicule. Et pourtant, les témoins ne manquaient pas, on leur avait rapporté l'incident de la caravane, la fabuleuse trouvaille, ils avaient entendu des témoins, ils venaient statuer sur ce fameux miracle. Ils étudièrent l'enfant, l'interrogèrent, ses parents de même. Bientôt ils conclurent au véritable miracle, décrétèrent que leur Dieu l'avait guidé, renforçant ainsi leur culte. Ils conseillèrent à la famille de faire entrer la petite dans les ordres, lorsqu'elle aurait l'âge requis.

Celeste fixa l'autel, sur lequel ils leur arrivaient de pratiquer quelques sacrifices à la gloire de Kel'Chin, avec une petite moue dégoûtée. Elle laissait toujours les autres s'en charger à sa place. Quand elle repensait à l'incident, elle n'était pas encore capable d'expliquer rationnellement ce qui c'était passé. Sur le moment tout avait semblé si... Simple. On lui avait simplement expliqué ce qu'il fallait qu'elle fasse. Elle l'avait fait. La fièvre avait gagné les croyants laissant l'ingénue complètement pantoise. Si le pays avait été moins fervent, à l'heure qu'il est elle serait emprisonnée dans une institution pour cause de démence.

À l'époque elle ne connaissait pas grand chose à la religion. De temps à autre on faisait encore référence à ce miracle. C'est l'une des raisons qui faisait que Celeste était encore l'une des deux grands prêtres de Kahl. Ses détracteurs quant à eux n'hésitaient pas à rappeler qu'elle n'était jamais que l'enfant à un seul et unique miracle. Plus tard elle n'avait relevé personne d'entre les morts, ni n'avait guérit quiconque. Ni même entendu la voix du Tout Puissant. Ce qui n'était pas tout à fait exacte. La jeune femme avait choisi délibérément d'ignorer la voix de leur Seigneur, n'appréciant que très moyennement d'être utilisée par quelqu'un, fusse-t-il Kel'Chin lui-même. Jusqu'à présent ça ne lui avait pas desservi. Elle n'était pas morte foudroyée par le foudre.

Ce miracle avait changé de tout au tout son petit monde cependant. Sa mère était passée de simple croyante à fanatique. Au retour de la caravane, la fortune de son mari assuré, la mère de Celeste était entrée dans les ordres, gravissant rapidement les échelons, grâce à son statut de  « mère de l'enfant miraculée ». Bientôt elle fût nommée Grande Prêtresse à Salinca. Son père lui ouvrait son magasin à Kahl, puis un autre. Toute sa famille semblait être heureuse, comblé par leur foi et la richesse. Cependant c'est pendants ces années que la petite Celeste se sentait le plus seule. Sans cesse déchirée entre deux villes. Et c'est aussi pendant cette période trouble qu'elle trouva son totem. Il trônait parmi d'autres objets dans une commode. Un tube de rouge à lèvre pêche.

Trouver son totem est une étape importante pour tout à chacun que ce soit pour Heka ou Dena. Lorsqu'elle saisit le tube entre ses doigts de petite fille elle se sentit enfin complète. Elle sortait enfin la tête de l'eau, l'air semblait plus pur, respirer semblait plus facile, le monde semblait plus beau. Une sensation sans doute similaire à ce qu'avait ressenti sa mère lorsqu'elle rencontra la foi pour la première fois. Elle cru comprendre pourquoi le Kel'chinisme représentait tant aux yeux de sa génitrice. Connaîtrait-elle la même illumination si un jour elle devenait à son tour aussi croyante qu'elle ?

Elle était mitigée. Sa mère semblait heureuse et pourtant elle et son père ne se parlaient plus, pire, ils avaient maintenant deux mode de vie incompatible. L'un considérait que les biens et la richesse suffisait simplement alors que l'autre clamait qu'il fallait vivre dans le plus simple appareil, dans l'austérité la plus complète. Plus question pour Madame de toucher son mari ou d'accepter aveuglément que celui-ci continue de vivre dans le luxe et le faste. Plus question pour Monsieur de subir les lubies de sa femmes toutes plus folles les unes que les autres, il se laissait consoler volontiers par quelques femmes de petite vertu. Les deux adultes finirent par se séparer, d'un commun accord. Le divorce n'était pas administratif. Ils vivaient juste séparé... L'une noyant ses pulsions fanatiques dans la religion l'autre amassant toujours plus de richesse et noyant sa solitude dans l'alcool et les femmes. La réputation de l'un et l'autre servant leurs ambitions. Un véritable conte de fée.

La jeune femme se redressa puis se dirigeait vers la nef, elle se vidait un peu, au moins. Elle adressa quelques sourire courtois aux fidèles, se laissant embrasser volontiers les mains par les plus fervents. Elle s'était longuement approprié leur séparation, pensant être responsable de la fin de leur idylle. Durant cette période elle avait pris l'habitude d’obéir aveuglément aux décisions de ses deux parents. Espérant que si elle leur montrait à quel point elle était désolée et désireuse de se faire pardonner ils finiraient par se remettre ensemble. Ah. Ce que les enfants pouvaient être stupides, parfois.

Durant les six années suivantes, elle s'était pliée aux plus étranges extravagances de ses deux parents. Goûtant les six premiers mois d'une année aux offices plus que sanglantes de sa mère, y participant même en tant qu'enfant de cœur. Les fidèles avaient suggéré que la Messagère de Kel'Chin tue elle-même les sacrifices. Longtemps la jeune enfant avait refusé, ainsi que sa mère. Les six derniers mois elle les passait chez son père, qui, devenu maintenant un riche homme d'affaire, qui passait ses soirées à faire la fête où a participer à d'autres éventements où les femmes venaient en dansaient de manière ostentatoire pour l'assemblée féminine ou bien masculine. On lui demandait sans cesse de raconter à sa manière ce qui s'était passé durant la fameuse expédition qui avait rendu célèbre sa famille, encore et encore, on lui demandait de faire quelques prédictions et elle s’exécutait, la bouche en cœur.

Plongée  ainsi dans deux mondes opposés tour à tour où elle était exposée comme s'il s'agissait d'un phénomène de foire elle se sentait perdre pied. Comme si on la forçait à perdre son identité propre pour ne devenir qu'une simple marionnette. Elle aurait pu en perdre l'esprit. Pendant sa treizième année sa mère lui avait demandé de participer de manières plus actives aux sermons. Au début il lui arrivait de faire de lire de long discours incompréhensibles écrits au préalable par sa génitrice, simplement. Et puis, Agnès avait décidé que Celeste était prête à accomplir son premier sacrifice.

La jeune femme s'arrête, prenant appuis sur un des bancs qui permettaient aux fidèles de se recueillir et prier. Les souvenirs de cette nuit hantait encore son esprit. Elle s'en souvient, comme si c'était hier. On lui avait fait revêtir une simple robe blanche, les fidèles psalmodiaient des psaumes tiré du livre saint de Kel'Chin. La bête était entendu simplement sur l'autel, attachée par les pattes. Elle bêlait de peur. Celeste pouvait le ressentir au plus profond de ses entrailles, faisant écho à sa propre terreur. On lui avait remit un couteau dans les mains, magnifiquement ouvragé. Sa mère faisait des allez retours, citant la parole de Kel'Chin. Il faisait sombre, de simples bougies illuminaient l'église, créant ainsi une ambiance feutrée et intimiste particulièrement déplaisante. L'air était moite, la chaleur de l'été n'aidait pas à calmer les ardeurs des croyants qui ce soir semblaient particulièrement enhardi.

Un chant lugubre sortait de la bouche des fanatiques, ils frappaient du pied le sol pour ne pas perdre  le rythme, l'église à ciel ouvert semblait vibrer toute entière. On poussait le bourreau vers l'autel, son visage se décomposait à mesure qu'elle avançait, les yeux fixés dans les yeux noirs de sa victime. La peur qu'elle ressentait se mua en une terreur insondable. Ses membres frêles tremblaient ainsi que ceux de la pauvre créature, cruellement liées. C'était la première fois qu'elle entrait en symbiose avec un être. La petite fille regarda autour d'elle, la respiration haletante et le regard suppliant. Son corps tout entier était pris de tremblement. La fièvre des croyants en semblait renforcée, comme s'ils nourrissaient leur chant de la peur dans son plus simple appareil. La fillette était tout de même poussée en avant par des mains inconnus.

Arrivée devant l'autel elle se retournait, la respiration courte, les autres semblaient aussi perdre haleine comme s'ils ressentaient une excitation moite et suintante. Le sourire aux lèvres et les yeux rivés sur la petite fille. Personne ne semblait vouloir arrêter cette mascarade. Elle se retourna vers la pauvre créature, alors que sa mère était à côté d'elle. La Grande Prêtresse lui expliquait ce qu'il fallait faire. Un coup direct dans la gorge. C'était simple, lui disait-on. C'était le moment. Elle brandit le couteau, jetant des regards en coin à la pauvre créature. Puis elle l'abaissa lentement. Tout ça n'était que pure folie. Tout ça n'était que pure sadisme. Kel'Chin ne voulait pas ça. Elle suspendit son geste, s'apprêtant à relâcher l'arme et à fuir, loin. Puis, sa mère empoigna ses deux mains avec les siennes et enfonça la lame dans le cou de la pauvre créature qui rendit son dernier souffle et mourut dans un dernier bêlement. L'assemblée toute entière se redressa comme un seul homme, applaudissant à tout rompre, chantant des psaumes de liesses. La petite fille regardait toujours la pauvre créature, le sang couvrait ses mains et son visage, ayant touché la carotide. Sa toge immaculée était à présent couverte de rouge. Elle avait un goût métallique dans la bouche. On venait de poignarder sans retenue son enfance, son innocence. L'ingénue n'était plus.

La jeune femme s'assoit sur le banc, une main posée sur la bouche, secouée d'un haut-le-cœur. Certains fidèles s'approchaient, la mine soucieuse. Elle se redressa, adressant un sourire qui se voulait rassurant. Tout irait mieux dans une seconde. Pourtant le souvenir hanterait son esprit jusqu'à sa mort. L'incident avait fini de la convaincre que le Kel'Chinisme n'était pas véritablement compris. Que les fanatiques finalement ne valaient guère mieux que les hérétiques qu'ils pourchassaient sans relâche. Elle replongea encore dans ses souvenirs.

C'est cette année là qu'elle choisit d'intégrer les ordres, à Kahl. Fuyant comme la peste la folie de sa mère. Les apprentis pouvait choisir de recevoir les enseignement directement auprès d'un grand prêtre ou se retirer simplement dans une espèce d'internat, encadrés par des prêtres. Il faut savoir que la manière de vous inculquer le culte dépendait souvent des institutions. Celles de Kahl avaient tendance à être plus libre qu'ailleurs, ces institutions ressemblaient d'ailleurs  à de simples écoles pour enfants de bourgeois. La plupart de ces enfants ne choisissaient pas vraiment leur destins. Beaucoup craignaient Dieu et plus sérieusement ceux qui chassaient les hérétiques, chacun proclamaient haut et fort qu'ils croyaient dur comme fer aux paroles transmises par le Tout puissant. Pourtant il n'y avait que peu de véritable croyant. On avait choisit cette vocation pour eux, par dépit.   Soit ils n'étaient pas les premiers nés d'une famille et donc ne touchaient pas à l'héritage familial, soit on les avait envoyé pour corriger un peu leur caractère de cochon ou tout simplement pour ne plus avoir à supporter les jérémiades de pré-adolescents.

Les enfants avaient tendance à être plus réaliste que les adultes. L'institut n'était pas austère, on n'interdisait pas aux garçons et aux filles de se rapprocher comme ailleurs. Que jeunesse se fasse, avait l'habitude de dire Prêtre Simon, directeur de l'institution et  professeur préféré de la petite Celeste. Elle découvrit en lui un véritable mentor, il avait une vision de la religion qui ressemblait un peu à la sienne. Ses sermons d'un nouveau genre avait même tendance à lui valoir quelques ennuis. L'homme cependant ne changeait pas de refrain, croyant dur comme fer que Kel'Chin n'est pas aussi sanguinaire et austère qu'on aimerait leur faire croire. Des pensées dangereuses, bien trop dangereuses pour en faire un acteur principale de la scène religieuse. À défaut de sermonner le public il avait décidé de le faire auprès de la population d'Heka de demain, les enfants.

Ces sept ans furent l'occasion pour Celeste de renforcer ses croyances et d'expérimenter la vie. Des jeunes coincés dans un internat, que croyaient vous qu'ils fassent ? Ils apprennent. Grandissent. Premiers émois, premières bêtises, tout à fait encadré par des religieux avant-gardistes. La liberté avait une saveur étrange. Après quelques années d'obéissance aveugle aux lubies de ses deux géniteurs, la jeune adolescente en découvrait le goût acidulée et pétillant. Elle s'ouvrit un peu. Dans ce petit corps coincé et timide se cachait une jeune fille charismatique, au rire cristallin, un petit brun de folie dans les yeux. Elle se découvrait gourmande, désireuse, presque capricieuse, elle commençait à apprécier les regards des autres, à en demander d'avantage même. C'est d'ailleurs à cette époque qu'elle découvrit véritablement le pouvoir lié à son totem.

Lorsqu'elle ressortit de l'institution du Prêtre Simon, Celeste avait changé du tout au tout. Elle était plus confiante que jamais. Elle décida d'offrir ses services à l'église de la capitale, se refusant à côtoyer de nouveau sa mère et ses sombres offices. Elle retourna quelques temps chez son père, participant volontiers cette fois aux nombreuses festivités de son père lorsqu'elle le pouvait. Radieuse, elle était devenue une femme forte, elle attirait naturellement le regard et plus encore. Monsieur Cooper eu dû mal à reconnaître sa chère et tendre petite fille. Les années passaient et Celeste faisait parler d'elle en bien et en mal.

Certains lui reprochaient ses petites... Frasques. Notamment ses nombreuses liaisons avec quelques hommes et femmes mariés ou non, d'ailleurs. Qui était donc cette femme qui, s'affichait ouvertement aux bras de partenaires tous plus différents que les autres ? Cette religieuse qui bafouait certaines déclarations de collègues ? On admirait ou haïssait ses manières et son audace. Quoi qu'il en soit Celeste arrivait à donner une image de l'église un peu plus lumineuse. Les jeunes entraient plus volontiers dans des congrégations. De plus elle était la fille de  Agnès Levesque-Cooper, Grande Prêtresse de Salinca, aussi connue pour le miracle qu'elle avait accomplit étant plus jeune. Malgré les détracteurs elle était arrivée à avoir un cercle de fidèle qui la soutenait envers et contre tout.

Les années passaient, Celeste avait fini par déménager dans un manoir de la capitale, le chef de famille l'ayant déserté. Le père de la jeune femme s'était finalement assagit, suite à une attaque du cœur. Il en était sortit vivant, cependant il réalisa que la vie était plus importante que tout l'argent du monde. Il était allé à Salinca et avait essayé de faire les yeux doux à son seul et unique amour. Sa mère fatiguée par toutes ces années de pratique et enchantée par ce revirement de situation avait volontiers laissé la place à un nouveau Grand prêtre, n'abandonnant cependant pas complètement les ordres, pour ne rester qu'une simple prêtresse. Ils étaient redevenus un couple charmant et heureux. On pouvait appeler ça un miracle.

Enfin, pour leur progéniture tout cela était bien risible. Elle avait subit leur folie, avaient vu en fait des choses toutes plus horribles les unes que les autres. Elle en avait été marqué profondément, elle était certes devenue plus indépendante et forte mais à quel prix ? La blonde en gardait une profonde cicatrice. Ils leur avaient légué un petit bout de folie, un bout de leur ambition dévorante, que restait-il de l'ancienne Celeste au visage d'ange ? Rien.

Finalement Celeste était devenue Grande Prêtresse, elle se battait aujourd'hui pour se faire une place sur la scène religieuse. Un but précis en tête. On pouvait bien croire qu'elle n'avait pas eu la vie facile, de toute façon elle s'était promis de gardé son histoire, bien à l'abri dans son cœur. Se composant des enfances douceâtres et des parents absolument parfaits et fantastiques quand on lui demandait. Elle ne voulait pas montrer à ses détracteurs ses faiblesses. La jeune femme se redresse et se glisse dans le confessionnal relayant un prêtre. Elle susurra doucement au travers des grilles du confessionnal, les doigts noués à la grille, un étrange sourire sur les lèvres.

«Je t'écoute mon enfant... Tu peux tout me dire, je garderais tous tes secrets, tout cela restera entre toi, moi et Kel'Chin.»