Cela faisait quelques jours que la température avait augmenté dans les plaines. L'arrivée de l'été, très certainement, bien qu'un peu tardif. L'albinos ressentait plus de facilité à supporter le froid plutôt que le chaud, alors cette période de l'année lui était chaque fois plus ou moins pénible. Enfin, il trouvait toujours de quoi se rafraîchir, même ne serait-ce qu'un peu.. Que ce soit une baignade improvisée dans le lit de la rivière, ou bien une sieste à l'ombre des feuillages, tout était bon pour lui éviter de suffoquer. Aujourd'hui en l’occurrence, il avait opté pour la seconde option.
Réfugié dans le bois bordant le village, cela faisait maintenant bien deux ou trois heures qu'il s'était assoupi, appuyé contre un tronc imposant. Pain ne rêvait pas, et ne se reposait jamais vraiment en vérité. Soumis à un sommeil superficiel, ça ne l'aidait pas à avoir toute sa tête. Mais qu'importe, ce n'était pas comme s'il avait besoin d'être sain d'esprit. Et c'est encore dans les choux qu'il se réveilla doucement, ne parvenant plus à « dormir ».
Il resta ainsi un petit moment, sans bouger, comme pour réaliser l'endroit où il était, ce qu'il faisait, l'heure qu'il était. Bien évidemment il ne pouvait pas savoir l'heure exacte, mais il avait apprit à s'aider du Soleil comme repère. Ainsi, le voilà en fin d'après-midi. Soupirant comme si c’eut été une corvée, il se leva doucement avant de s'étirer brièvement. Un bâillement lui décrocha la mâchoire un instant, il se frotta l'arrière du crâne, puis se mit en route. Vers où ? Le village. Sans même avoir quelque chose à y faire, simplement, comme ça.
Il marchait d'un pas un peu lourd, mais il ne lui fallut finalement pas longtemps pour se réveiller totalement. La longueur du trajet fut suffisante. Il n'avait pas faim, comme souvent, il fallait dire aussi qu'il se nourrissait assez peu. Il ne tombait pas tous les jours sur des personnes, et les animaux c'était chiant à attraper. Alors il grignoterait un truc qui lui tomberait sous la main et ça serait bien...
Mais, alors qu'il venait d'entrer au sein des ruines qu'était devenu le village, il s'arrêta un instant, planté comme un idiot au milieu de la rue. Ces pas. Il les reconnaissaient. Ces pas qui s'approchaient.
« Pas encore... » pensait-il, encore incertain. Sa pensée fut cependant bien vite confirmée, lorsqu'il aperçu la silhouette à l'autre bout du village.
« C'est pas vrai... » pesta-t-il alors en son fort intérieur, le tout accompagné d'une expression blasée sur le visage, ainsi que d'un nouveau soupir.
Quatre jours. Ça faisait quatre jours que ce gars avait débarqué ici, et qu'il revenait le harceler pour des raisons totalement étrangères à l'albinos. Pourquoi est-ce qu'il ne s'en était pas tout simplement débarrassé en se l'offrant comme repas ? C'était une bonne question. Pas l'envie, même si ses visites répétées l'agaçaient quelque peu, il n'avait pour autant pas envie de le déchiqueter... Peut-être parce que cette personne ne le forçait pas non plus à faire ce qu'il n'avait pas décidé. Et ça c'était une bonne chose.
« Angel » qu'il s'appelait. Quelle ironie. Ou coïncidence, à savoir.
Malgré toute cette étonnante tolérance dont Pain faisait preuve, il n'avait pas non plus tant envie de le voir que ça. Et il ne se gênait pas pour l'exprimer. Si bien qu'il laissa le brun s'approcher, tout en restant planté où il était, comme s'il l'attendait. Mais lorsque ce dernier fut arrivé près de lui, il tourna la tête après l'avoir fixé un moment l'air de dire « T'es encore là ? ». Propre à lui-même, il ne le salua d'aucune manière, affichant plutôt une moue explicitement agacée. Il s'adressa finalement à lui en premier de sa voix rauque et presque érayée, sans daigner lui porter un nouveau regard.
- T'en as pas marre ?